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Association Culturelle Arménienne de Marne-la-Vallée (France)

La langue arménienne dans le monde

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par Krikor Amirzayan
texte mis à jour par l'auteur, pour l'ACAM, en date du 2 avril 2000.
  • Préambule
    Combien sommes-nous dans le monde à parler et écrire l'arménien ? Quelle sont les positions de l'alphabet et de la langue arménienne dans le monde ?
    Quel avenir pour cette langue tri-millénaire et cet alphabet original, inventé il y a plus de quinze siècles par Mesrob Machdots ? Autant de questions auxquelles répond dans cette brève étude, Krikor Amirzayan, auteur de deux ouvrages de caricatures parus à Erévan. Notons enfin que cet article a paru dans de nombreuses publications arméniennes dont "France-Arménie" (mensuel-Lyon. janvier 1986), "Arménia" ( quotidien arménien de Buenos Aires, en espagnol, 11 mars 1986), "L'Arc-en-Ciel Arménien" ( mensuel-Marseille. numéro 5- Octobre 1991), "Navassart" (mensuel culturel arménien de Los Angeles- numéro 128 mars 1993), "Abaka" (hebdomadaire-Canada. numéro 1004 du 11 septembre 1995), "Tidag-Scope International" (mensuel arménien de Beyrouth- numéro 17, septembre 1997). L'auteur présente ci-dessous son article, remis à jour pour l'ACAM.

  • Plus de 3000 langues parlées dans le monde, dont l'arménien
    Notre planète est une tour de Babel !
    Avec ses quelque 3 000 langues distinctes qui ne constituent qu'une infime partie des langues parlées par l'homme depuis son origine, le monde est un espace où se côtoient des milliards d'individus qui s'expriment en langues ou dialectes souvent incompréhensibles en dehors des groupes humains de la même ethnie ou du même peuple.
    Des cinq continents, c'est en Afrique que les langues sont les plus nombreuses (plus de 1 100), l'Europe arrivant en dernière position avec seulement une soixantaine de langues distinctes. Cependant, toutes ces langues n'ont pas les mêmes poids démographiques. Par exemple, si plus de 260 millions de personnes parlent l'Anglais en Amérique du Nord, à peine 250 000 indiens d'Amérique parlent encore de nos jours plus de 50 langues.
    En Amérique du Sud, seules 50 des 250 langues répertoriées, sont parlées par des groupes de plus de 10 000 personnes. Ce phénomène n'étant pas le seul fait du continent américain, on compte par exemple au Gabon (Afrique), pas moins de 40 langues pour à peine 900 000 habitants. Des plus de 3 000 langues parlées sur Terre, une centaine seulement est utilisée par plus d'un million d'individus, totalisant néanmoins près de 90% de la population totale du globe. Le reste, soit à peine 600 millions d'hommes, partageant les quelque 2 900 langues restantes.

  • Le chinois au premier rang des langues, l'arménien, soixantième
    Les langues les plus parlées dans le monde sont le chinois (1 100 millions), l'anglais (500), l'hindi-urdu (480), le russe (290), l'espagnol (280), l'arabe (240), l'indonésien-malais (220), le portugais (180), le bengali (175), le français (140), le japonais (120), l'allemand (110). Le turc parlé par près de 80 millions de personnes occupe la quinzième position des langues les plus utilisées de la terre. L'arménien arrive à la soixantième place (7 millions), devant le danois (5), le norvégien (4), l'hébreu (4) et le géorgien (4).
    L'anglais, langue officielle dans 47 pays, arrive en tête du classement des langues internationales, suivi par le français (26 pays), l'arabe (21), l'espagnol (19), alors que le chinois est langue officielle seulement dans trois pays (Chine, Singapour, Taiwan). Parmi les familles linguistiques, l'Indo-européen est la famille dominante, parlée par près de 2,6 milliards d'individus, soit un peu moins de la moitié de la population totale de la terre. Ce vaste ensemble Indo-européen représentant plus de 200 langues, se subdivise en sous-groupes beaucoup plus homogènes, classés en branches latines, germaniques, celtes, baltes et iraniennes.
    Dans cette grande famille des langues Indo-européennes, l'arménien fait curieusement partie des langues isolées. Au même titre que le grec ou l'albanais. Certains linguistes apparentant l'arménien au phrygien, langue aujourd'hui disparue et dont les origines se trouveraient dans les Balkans.

  • L'arménien, le plus riche des alphabets anciens avec 38 lettres est aujourd'hui l'un des 25 derniers alphabets distincts
    De toutes les langues de la planète, à peine plus d'une centaine sont des langues écrites (avec écriture en support) en 25 systèmes d'alphabets distincts. Le chinois est le plus utilisé (1,1 milliard) suivi de l'alphabet cyrillique (300 millions), du devangari (250) l'arabe (240) et le japonais (220).
    Avec sept millions d'adeptes de l'alphabet de Machdots , l'arménien arrive en dix-neuvième position mondiale des écritures les plus utilisées. Mais avec ses 38 lettres, l'arménien est le plus riche des alphabets anciens, précédant le géorgien (33 lettres), l'arabe (28), le grec (24) et l'hébreu (22). Les Chinois utilisant quant à eux près de 30 000 idéogrammes.

  • Quel avenir pour les langues ?
    Le progrès technique, l'éducation et la mondialisation des phénomènes économiques, sociaux et culturels, finiront-ils par estomper les barrières linguistiques et uniformiser les langues ? Certaines langues inadaptées aux progrès technologiques d'un monde en mutation, seraient menacées de disparition à court terme. Car si la langue n'est plus le support d'une puissance démographique, économique ou politico-industrielle, elle cesse d'exister ! L'échec de l'espéranto en est la preuve la plus éclatante.
    Ainsi, selon les spécialistes, des milliers de langues qui ne bénéficient d'aucun support écrit, vont disparaître dans les deux siècles futurs. L'une des phases de cette disparition serait le bilinguisme. Pratiqué sur une longue période, le bilinguisme aboutirait tout simplement à l'écrasement puis la disparition de la langue d'origine, au profit de la langue d'adoption. Certains linguistes comparent cette assimilation, à la victoire d'une culture sur une autre. Une victoire redoutable, car définitive... Notons enfin que la langue victorieuse n'est pas forcément la plus riche ou la plus belle.
    Cependant, le bilinguisme n'est pas une fatalité s'il s'accompagne d'une conscience nationale et de valeurs culturelles fortes. L'attrait pour les langues étrangères dominantes, n'est jamais désintéressé. Ainsi, pendant l'occupation allemande, le nombre de jeunes Français ayant choisi l'allemand comme langue vivante dans les écoles, avait progressé rapidement; les parents ayant perçu l'importance de la langue de Goethe, pour l'avenir de leurs enfants ! Ce phénomène pouvait se comparer, il y a peu, à la progression des écoles russes en Arménie.

  • Langue antique, l'arménien reste une langue vivante
    Les langues des cultures les plus brillantes de l'antiquité, comme l'égyptien, le phénicien, l'étrusque ou le hittite, ont à jamais disparu. Le latin, lâché par l'Eglise catholique en perte de vitesse, est devenu une langue morte.
    Venant de la haute antiquité, après avoir traversé l'ère du christianisme, l'arménien est toujours une langue vivante. Plus que la langue, l'alphabet arménien occupe une place privilégiée dans le cercle restreint des écritures utilisées à travers le monde. Cette richesse écrite, peu de peuples la disposent. Il n'y a pas d'alphabet américain, français ou italien. Il y a en revanche, un alphabet arménien propre à la nation arménienne.

    Ce constat doit nous pousser à renouer nos liens avec l'oeuvre de Mesrob Machdots, afin de découvrir et transmettre aux générations diasporiques futures, ce joyau inestimable du patrimoine arménien qu'est l"Aïpoupéne" (alphabet Arménien). Le poète Barouïr Sévag écrivait "Nous sommes peu, mais on nous appelle Arméniens". Nous ne représentons, il est vrai, qu'un peu plus du millième de la population mondiale. Mais notre alphabet original fait partie des seuls 25 derniers alphabets utilisés dans le monde.

    C'est dans doute cette richesse culturelle extraordinaire de disposer d'un alphabet propre qui fait aussi l'originalité de la culture arménienne. Un particularisme qui est une force de différence dans un globe enclin à la mondialisation et l'uniformisation des modes de vies et des cultures. Nous sommes peu, mais nous avons l'arménien ! Apprenons à l'utiliser plus souvent.

    Krikor Amirzayan


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