L'auteur | |
Naissance le 4 janvier 1930 à Valence (Drôme, France), décès le 16 octobre 2012 à Valence (Drôme, France) Article Le Monde, 21 avril 1987 Ce n'est pas un voyageur comme les autres qui est descendu, le dimanche 19 avril, gare du Nord à Paris, du train de Moscou, et qui a pris, le jour même, le train pour Valence. Voilà quarante ans qu'il a quitté la France et trente ans qu'il a multiplié les démarches, frôlant souvent le désespoir, pour y revenir. M. Jean Der Sarkissian était, jusqu'à ce qu'il franchisse la frontière soviétique, samedi 18 avril, un des deux cents Français retenus contre leur gré en URSS, certains depuis la guerre... M. Der Sarkissian est né en 1930 à Valence (Drôme), de parents arméniens échappés au massacre par les Turcs et réfugiés en France. Ceux-ci décident, en 1947, comme plusieurs milliers d'autres, de s'installer en Arménie soviétique, qu'ils ne connaissent pas, mais que la propagande stalinienne de l'époque décrit sous des couleurs de rêve. Le piège se referme sur eux et sur leurs enfants. Ce qu'ils découvrent sur place, c'est une misère effroyable et une surveillance policière implacable. Le pain blanc qui leur était servi sur le bateau soviétique venu les chercher à Marseille s'était transformé en pain noir, au propre et au figuré, dès le passage des Dardanelles. Le jeune Der Sarkissian, qui n'a que dix-sept ans à l'époque veut aussitôt repartir. Il n'est est pas question. " Souvent, on allait à la montagne avec les jeunes de mon âge venus de France et on pleurait ", se souvient-il. Kirovakan, la petite ville de montagne où on les a installés n'a alors que 30 000 habitants (elle en a 160 000 aujourd'hui). L'antenne locale du MGB (successeur du NKVD et ancêtre du KGB) veille sur les nouveaux arrivants. Ceux qui se rebiffent ou prononcent en public des paroles malheureuses disparaissent pendant la nuit. Tous se taisent. Le simple fait de demander l'autorisation de rentrer en France provoque l'arrestation immédiate et l'envoi au goulag. Staline règne… |
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