En 1915, profitant de la Première Guerre mondiale, le Gouvernement Jeune-Turc décide en secret l'extermination du peuple arménien, au nom d'un rêve panturquiste. Les Arméniens sont coupables d'exister. L'arrêt de mort est dissimulé derrière une prétendue mesure de déplacement.
L'auteur retrace l'odyssée infernale de familles arméniennes essayant désespérément d'échapper à la monstrueuse machine génocidaire conçue pour les broyer, d'un camp de la mort à un autre. Les rares survivants sont transformés en apatrides, voués à l'errance, en quête d'une terre d'asile.
Des centaines de milliers d'exilés, animés par la rage de survivre, affrontent l'indifférence ou le rejet, surmontent la détresse ou l'adversité et se dispersent dans le monde entier.
Après avoir été victimes du premier génocide du 20emc siècle, voilà les Arméniens acteurs involontaires du premier drame migratoire de ce même siècle. Cette incroyable histoire se situe à la limite de l'intraduisible et tient en haleine le lecteur de bout en bout.
Article d’Édouard Pehlivanian, France-Arménie, Mars 2021
Il existait au début du XXe siècle à Tigranaguerd, aujourd'hui Diarbé¬kir, une rue des artisans où des boulangers, bouchers, forgerons, menuisiers, charpentiers, travaillaient dans une dizaine d'ateliers, ils étaient tous arméniens. Écrit sous forme de roman, l'ouvrage retrace l'odyssée infernale de ces familles dont très peu en sortiront vivants. L'auteur, Maurice Dolmadjian, est le mieux placé et le mieux armé pour nous conter cette saga familiale : ce professeur de philosophie est le petit-fils paternel d'Ohannès, le forgeron du village. On distingue bien les deux parties du titre dans ce travail de reconsti¬tution. « Meurs » c'est l'ordre propagé sous forme de télégrammes par le gou¬vernement Jeune-Turc. Dans un langage simple, direct et imagé, nous visitons l'enfer des camps : Meskéné, Rakka, Ras-ul-Aïn... pour arriver finalement à Deir-ez-Zor très défavorablement connu de tous les Arméniens. Et là, il faut distinguer le camp-mouroir et la ville ; entre les deux, un passage contrôlé par les autorités qui ne laissent passer que des hommes exploitables dans cette ville, une zone grise où on peut encore corrompre des gardiens. Les Arméniens y semblent peu inquiétés pendant un certain temps, et occupent des fonctions économiques et administratives. « Deviens » fait allusion aux exils multiples, passages obligés d'une population déracinée constituée essentielle¬ment de femmes et d'enfants. Il faut dans ces déplacements tenir compte des points de chute intermédiaires comme Beyrouth, avant de trouver refuge en France et y prendre racine. On peut dire que la Diaspora en Europe a aussi été victime de la propagande soviétique pour un retour en Arménie. Certains ont ainsi subi quatre exils en un demi-siècle ! C'est un récit terrible dont on ne sort pas indemne.
Édouard Pehlivanian