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Association Culturelle Arménienne de Marne-la-Vallée (France)

Zaven BIBERIAN
( 1921 - 1984 )

L'auteur

Zaven BIBERIAN --- Cliquer pour agrandir
Naissance en 1921 à Istanbul (Turquie), décès le 4 octobre 1984 à Istanbul (Turquie).

Zavèn Bibérian, est né après le génocide qui élimina presque toute présence arménienne de ce qui allait devenir l'Anatolie turque. Il collabora dans les années 1940 dans différentes revues engagées où il publie notamment « Al gı pavé» (« Maintenant, ça suffit ! ») qui dénonçait les décisions et les publications anti-arméniennes, article pour lequel il fut emprisonné et inculpé. Il quitta la Turquie en 1949 pour aller travailler à Beyrouth où les conditions de vie furent si difficiles qu'elles le motivèrent à rentrer à Istanbul en 1953. Son retour en Turquie fut accompagné d'un clair engagement politique. En 1968, il fut élu au conseil municipal d'Istanbul dans lequel il fut adjoint au président du conseil. Dans les conditions défavorables au maintien d'une vie culturelle arménienne en Turquie, son rôle de journaliste fut déterminant pour maintenir et vivifier une haute culture écrite en arménien. À sa carrière de publiciste, Bibérian conjugua une activité littéraire. Il publia plusieurs romans : « L'effronté » en 1959, « La mer » en 1961, « Les amoureux désargentés » en 1962 et « Le crépuscule des fourmis » en 1984. Il meurt prématurément à l'âge de 63 ans.

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Livre numéro 2145
Zaven BIBERIAN --- Cliquer pour agrandir La traînée
Titre : La traînée / auteur(s) : Zaven BIBERIAN - Roman - Traduit de l'arménien occidental par Hervé Georgelin
Editeur : MetisPresses
Année : 2015
Imprimeur/Fabricant : Esperia Srl, Lavis (TN) Italie
Description : 14 x 21 cm, 264 pages, couverture illustrée en couleurs
Collection : Le métier à tisser
Notes : "La traînée" a bénéficié du soutien de la Fondation Calouste Gulbenkian et du Centre national du Livre.
Autres auteurs : Hervé GEORGELIN [traducteur] -
Sujets : Turquie -- Istanbul (Turquie ) -- 20e siècle
ISBN : 9782940563029
Bibliothèques : Consultable à la Bibliothèque de la Cathédrale apostolique arménienne, Paris
Catalogué à la Bibliothèque Nationale de France
Prix : 18,00 euros
Achat possible sur : Amazon

Commentaire :

Gulgune, la jolie fille adoptive d’Osman bey a vingt ans. Elle vit à Moda sur la rive asiatique d’Istanbul. Elle a envie de vivre, d’aller au cinéma, d’être regardée, d’être aimée, de devenir quelqu’un et d’être heureuse. D’atteindre enfin à l’existence rêvée, celle qu’étalent les magazines de mode, le cinéma, la publicité. L’Amérique ne semble pas si lointaine…

Tout autour d’elle, dans son quartier d’Istanbul où voisinent Turcs, Arméniens et juifs, sa beauté provocante ne passe plus inaperçue. Excitant désirs, mépris ou jalousie, Gulgune est remise à l’ordre par sa « famille ». Qu’a-t-elle le droit d’espérer ? Qu’a-t-elle le droit de vivre ? N’est-elle vraiment qu’une petite bonniche ? Une traînée ?


Livre numéro 1793
Zaven BIBERIAN --- Cliquer pour agrandir Le crépuscule des fourmis
Titre : Le crépuscule des fourmis / auteur(s) : Zaven BIBERIAN - Traduction de l'arménien occidental et préface d'Hervé Georgelin
Editeur : MetisPresses
Année : 2012
Imprimeur/Fabricant : L.E.G.O. S.p.a. à Lavis (TN, Italie)
Description : 14 x 20 cm, 464 pages, couverture illustrée en couleurs
Collection : Le métier à tisser
Notes : Première traduction en français, Lexique
Autres auteurs : Hervé GEORGELIN [traducteur] -
Sujets : Arméniens -- Turquie -- Istanbul (Turquie ) -- 20e siècle
ISBN : 9782940406418
Bibliothèques : Consultable à la Bibliothèque de la Cathédrale apostolique arménienne, Paris
Catalogué à la Bibliothèque Nationale de France
Prix : 24,00 euros
Achat possible sur : Amazon

Commentaire :

De l'éditeur
Le roman de Zavèn Bibérian est un hapax dans la littérature arménienne occidentale. Il s'agit d'un roman inscrit dans la réalité turque, mais aussi dans l'individualisme désabusé et désorienté d'une génération qui doit supporter un présent qui voit s'effriter des valeurs « arméniennes », généralement portées aux nues et déclarées essentielles, mais aussi porter un passé, celui du génocide, qui ne lui parle pas.
Le roman de Bibérian nous emmène dans une Istanbul des années 1940-50 qui a conservé une structure de population issue de l'expérience impériale de par la diversité de ses groupes religieux et linguistiques hérités de la Constantinople ottomane. C'est dans ce cadre qu'il campe les tribulations de son héros si peu héroïque, Bared, jeune arménien. De retour du service militaire, durant la Seconde Guerre mondiale, Bared retrouve après plusieurs années d'absence sa ville et les membres de sa famille, qui, en raison des restrictions, se retrouve dans une quasi misère. Plus rien ne lui évoque alors le temps heureux de son enfance ou les promesses de sa première jeunesse. Commence alors le dur apprentissage de la vie adulte, qui voit l'une après l'autre les valeurs qui avaient fondé sa vie se désagréger comme autant d'illusions dans une nausée existentielle égarante.
Balançant entre le collectif et l'individuel, ce roman arménien montre une grande synchronie réflexive avec la vie culturelle occidentale, dont Bibérian était proche par son éducation en partie française. L'anti-héros, parfois sympathique, propose un contre-discours nationaliste arménien dont un lecteur, intéressé par le Proche-Orient, ne peut que s'étonner et se réjouir.

C'est une histoire sans histoire, c'est-à-dire celle d'un destin ordinaire dans l'Istanbul de l'après-guerre. Autant dire que le personnage, Barèd, jeune Arménien des années 1950 démobilisé d'une armée turque faite pour marquer sa différence, n'est ni un héros ni un antihéros (car l'anti-héroïsme suppose un héroïsme potentiel). Il est simplement l'interrogation de celui qui devient étranger à une société qui n'a plus de réponse à lui proposer, sauf celle de son oncle Souren. « Tu n'es pas un homme fait pour ce pays, oghloum. On te dit: Tu n'es pas un homme fait pour ce pays... Qui est-ce qui reste encore ici? Nous aussi nous sommes coupables, qu'est-ce que nous faisons dans un endroit où l'on ne veut pas de nous? » Paroles aux troublantes résonances si l'on se souvient de Hrant Dink, comme si son sort était déjà inscrit dans ce texte édité trente-sept ans avant sa mort et si entre l'Istanbul d'Erdogan et celle de Suleiman Demirel, le nom d'Arménien supposait identiquement l'acceptation de l'exclusion ou la mort.
Désagrégation des repères
A l'heure où la question ethnique s'impose dans la Turquie moderne au point de vouloir déborder ses frontières, la publication par les éditions MétisPresses du Crépuscule des Fourmis de Zaven Bibérian rappelle que la désagrégation des structures multiethniques qui ont fait l'histoire d'un pays entraine immanquablement la désagrégation des repères individuels et des vies qui lui ont donné existence. Elle rappelle encore qu'en faisant des hommes des sous-hommes, le refus de la diversité fait de l'Histoire une sous-Histoire. Sous l'apparence de l'itinéraire sans but d'un Arménien stambouliote qui traine son mal de vivre dans une communauté sans espoir, Le Crépuscule des Fourmis est la métaphore d'une société en décomposition qui cherche son salut dans la grisaille de l'uniformité où le manger, le boire et l'aimer sont dictés à tous à l'identique sans savoir que la marche réglée de la société par des lois uniques est la fin même de la société de la raison pour être le début d'une société sans âme. «Ils commencent à abimer les enfants dès l'école, enseigne l'oncle Souren. Ils donnent la fourmi en exemple à imiter. Ils s'efforcent de changer les êtres humains en fourmis. Ils y réussissent même. »
Préfiguration de Neiges d'Orhan Pamuk
Par son écriture longue, précise et interminable (462 pages écrites serrées), par la multiplication des rencontres et de ses visages où la peur suinte de l'ennui, le roman de Zaven Bibérian apparait comme la préfiguration de Neiges d'Orhan Pamuk, avec le même avertissement pour le monde en devenir et la même fin pour les héros qui refusent l'exil. L'Istanbul des années cinquante n'est que le prélude au Kars des années 2000. Au fond, à un demi-siècle de distance, Bibérian et Pamuk ont peut-être délivré le même message, comme si, en Turquie, le temps était aboli: «Au moment où elles se retiraient du monde, toutes les lumières rougeâtres en suspens sur le ciel noir s'éteignaient une à une. Des buchers s'élevaient à leur place. Et les buchers aussi s'immergeaient dans l'obscurité. »

René Dzagoyan, Nouvelles d’Arménie Magazine, numéro 190, novembre 2012


Philippe Pilibossian a réalisé une présentation de cet ouvrage, paru en 2007 dans sa version originale arménienne aux Editions Aras ; ce texte a été publié dans le Bulletin de l'ACAM numéro 70, page 9.

Philippe : Lien direct vers la page du bulletin


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